Donna Mergler, Judy Da Silva, Aline Philibert et Myriam Fillion ont constaté les ravages du mercure dans la communauté anishinabek de Grassy Narrows.
Le prix Scientifique de l’année de Radio-Canada 2023 récompense le travail exceptionnel accompli par quatre femmes : Donna Mergler, Judy Da Silva, Aline Philibert et Myriam Fillion. Elles travaillent depuis des années à documenter scientifiquement les répercussions à long terme d’un empoisonnement au mercure subi par la communauté autochtone de Grassy Narrows, en Ontario.
C’est un paysage de forêts, de lacs et de rivières. Des plans d’eau magnifiques, mais contaminés. Au mercure.
Les événements remontent à plus de 50 ans. Entre 1962 et 1970, une entreprise de pâtes et papiers située à Dryden, dans le Nord-Ouest de l’Ontario, a déversé 10 tonnes de mercure dans l’eau. S’en est suivi une contamination des rivières Wabigoon et English sur plus d’une centaine de kilomètres, en aval de l’usine, jusqu’à la communauté autochtone de Grassy Narrows.
Ces gens-là, on leur a imposé le mercure, ils n’ont rien demandé. Ils sont malades, leurs enfants sont malades, leurs petits-enfants sont malades. Le mercure s’accumule dans le cerveau. On ne peut pas l’enlever.
La vie des membres de cette communauté anishinabek s’est transformée d’un seul coup.
Les résidents qui vivaient de la pêche et qui se nourrissaient de leurs prises ont perdu à la fois leur gagne-pain et leur santé. Le mercure, transformé par des bactéries en méthylmercure, sa forme la plus toxique, s’est accumulé dans la chair des poissons. Ceux et celles qui s’en nourrissaient ont eu de graves problèmes de santé.
Bien que le taux de mercure dans les cours d’eau ait diminué depuis lors et se soit stabilisé au milieu des années 1980, le contaminant n’a pas disparu. En conséquence, les résidents de Grassy Narrows ont fortement réduit leur consommation de poisson.
Quant aux problèmes de santé associés à leur forte exposition au mercure pendant les années 1960, ils se font encore sentir aujourd’hui.
Les habitants de Grassy Narrows se battent depuis des décennies pour la reconnaissance non seulement des ravages de cette contamination sur leur santé, mais aussi de l’importance d’obtenir des soins spécialisés.
L’importance de documenter
Judy Da Silva, la coordonnatrice en santé environnementale pour la communauté de Grassy Narrows, raconte que la route a été longue mais qu’une nouvelle voie s’est ouverte en 2016 lors de sa rencontre avec la chercheuse Donna Mergler.
Une des choses que Judy a comprises, c’était l’importance de documenter, de façon scientifique, ce qui arrive à sa communauté pour justement trouver des moyens d’améliorer la situation.